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Interview du Premier ministre Jean-Claude Juncker dans "Münchner Runde" sur Bayerisches Fernsehen
En date du 18 septembre 2012, le Premier ministre Jean-Claude Juncker était l'invité de Sigmund Gottlieb dans le cadre de l'émission "Münchner Runde" sur la chaîne de télévision allemande Bayerisches Fernsehen.
Le Premier ministre et président de l'Eurogroupe s'est exprimé sur la situation dans l’Union européenne et la crise de la dette publique en zone euro.
Au sujet du programme illimité de rachat d’obligations de la BCE
Jean-Claude Juncker a, tout d’abord, défendu le nouveau programme illimité de rachat d’obligations concernant des titres de dettes à court et à moyen terme de la Banque centrale européenne (BCE), soulignant "que ces décisions n’ont pas été prises par des hasardeurs, voire des joueurs, mais des personnes qui ont soumis leurs décisions à un examen très approfondi". Jean-Claude Juncker a cependant tempéré les espoirs en précisant "qu’il n’est pas d’avis que cette mesure qui a été prise en toute indépendance et sans l’ingérence des gouvernements nationaux, suffira à endiguer la crise de la dette publique". Et d’ajouter que "ce sont avant tout les États membres qui devront accomplir leurs devoirs".
Jean-Claude Juncker a également rappelé que l’action de la BCE sera uniquement déclenchée si les États membres se sont activés d’une façon prophylactique en introduisant une demande officielle auprès des fonds de secours européens, forcément assortie de conditions. "On ne distribue pas uniquement de l’argent", a-t-il rectifié faisant allusion aux nombreuses conditions qui devront être respectées par les États membres.
Jean-Claude Juncker a réfuté l’assertion du journaliste selon laquelle les populations en Grèce, en Espagne et en Italie ne tireraient aucun avantage de ces rachats d’obligations expliquant que "ces mesures servent avant tout à assurer le flux des crédits au sein de la zone euro et permettent de garantir que les conditions de crédits et les conditions politico-financières soient identiques pour l’ensemble des acteurs de la zone euro" et d’éviter une fragmentation des marchés régionaux et nationaux. Le président de l’Eurogroupe était d’avis, dans ce contexte, qu’on ne peut pas, d’un côté, appeler de ses vœux la fin de la culture d’endettement et, de l’autre côté, "regretter les décisions de la BCE, qui cumulent dans une action qui conditionne les rachats d’obligations à des programmes, voire des réformes structurelles".
À la question de savoir si le rachat d’obligations par la BCE se soldera par une baisse de la pression qui est exercée sur les États en difficultés financières et, de surcroît, un ralentissement du processus des réformes, Jean-Claude Juncker a répondu par la négative.
Il a tenu a rappeler qu’il a mené tellement de discussions avec ses homologues européens et les ministres des Finances des différents États membres pour savoir que ceux-ci ont compris que "la disposition dans notre hémisphère de l’Europe de venir en aide à ces États diminuerait brutalement s’il s’avérait que les réformes et les mesures de consolidation budgétaires ne seraient pas prises". Et d’ajouter "que les responsables politiques dans l’Europe du sud le savent aujourd’hui mieux que nous l’aurions pu deviner il y a encore 4 ans".
Pour illustrer à quel point les réformes engagées en Grèce et dans d’autres pays soumis à des programmes d’ajustements portent leurs fruits, Jean-Claude Juncker a attiré l’attention sur les performances économiques qui ont été enregistrées en Grèce et au Portugal. Il a notamment cité la baisse de 12% des coûts salariaux et la réduction du déficit public en Grèce. Quant au Portugal, il a rappelé que ce pays a réussi à augmenter considérablement le volume de ses exportations.
Au sujet de l’Espagne
Interrogé sur le cas de l‘Espagne, Jean-Claude Juncker a expliqué "que l'Espagne sera confrontée à des conditions très dures, mais cela ne se fait pas de dire aux Espagnols à l'avance et par voie de presse ce que nous attendons d'eux". Il a ajouté que le "gouvernement espagnol est parfaitement au courant des réformes structurelles auxquelles on pense". Il a tenu à rappeler que les responsables politiques espagnols savent très bien "que nous allons faire pression pour que non seulement des mesures de consolidation budgétaires, mais aussi des réformes structurelles soient prises, qui généreront du potentiel de croissance pour que l’économie espagnole puisse se rétablir".
Au sujet du projet d’une union bancaire
Interrogé sur le projet d’une union bancaire, le chef de file de l’Eurogroupe a jugé qu'il faudrait "prendre le temps nécessaire" pour mettre en œuvre le projet de supervision bancaire par la Banque centrale européenne dans la zone euro. "Il est vrai que nous sommes résolus à mettre sur pied une union bancaire, une supervision bancaire, aussi vite que possible, mais il est aussi vrai que l'on devrait pour cela prendre le temps nécessaire", a déclaré Jean-Claude Juncker.
Jean-Claude Juncker s’est exprimé en faveur d’une mise en place d’une union bancaire basée sur des "préparatifs rigoureux", et non pas "pour l'introduction d'une union bancaire à la va-vite". Jean-Claude Juncker, qui a expliqué qu’il partageait l’analyse du ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble - qui consiste à penser qu’il ne sera pas possible qu'une autorité de supervision européenne centralisée puisse surveiller de très près 6.000 banques en Europe - s’est opposé à ce que le superviseur unique contrôle toutes les banques de la zone euro, même les plus petites.